Chaque mois, Thinkestân vous prépare une revue des meilleures analyses de la presse persanophone et anglophone au sujet des événements qui animent l’Iran et ses voisins.
Voici la revue de presse du mois d’octobre 2019, bonne lecture !
Depuis maintenant plusieurs années, de nombreuses affaires de corruption d’actuels ou d’anciens hauts fonctionnaires sont traitées par le pouvoir judiciaire. Ces affaires sont d’ailleurs très médiatisées par la presse iranienne. Trois vice-présidents de Mahmoud Ahmadinejad se trouvent aujourd’hui en prison. Des proches de certains ministres du gouvernement actuel sont jugés pour corruption. Mais l’affaire la plus médiatisée de ces derniers mois concerne Hossein Fereydoun (Rouhani), frère du Président Hassan Rouhani1Hassan Rouhani né Hassan Fereydoun a changé son nom de famille en 1961. Il était alors courant d’adopter un nom religieux au début des études théologiques. et ancien membre de la délégation iranienne lors des négociations nucléaires. Ce dernier a été condamné début octobre à cinq ans de prison par le tribunal de la Révolution pour corruption et se trouve actuellement à la prison d’Evin à Téhéran.
Hossein Fereydoun est condamné entre autres, pour ses relations avec certains banquiers, l’acceptation de pots-de-vin et du trafic d’influence. Cette affaire est très embrassante pour Hassan Rouhani. La proximité privilégiée de Freydoun avec son frère lui donnait une place importante au sein de la présidence de la République. Il nie pourtant toutes ces accusations et se dit innocent.
Depuis la nomination d’Ebrahim Raïssi par le Guide de la Révolution à la tête du pouvoir judiciaire, la lutte contre la corruption des hauts fonctionnaires et des membres de leurs familles s’est intensifiée de manière considérable. Cependant certains responsables des partis réformistes critiquent la justice pour son manque d’impartialité politique.
Ebrahmi Raïssi était en effet le rival d’Hassan Rouhani lors des élections présidentielles de 2017. Le quotidien Shargh revient sur le dossier de Hossein Fereydoun, un dossier délicat pour le Président Rouhani.
Lien vers l’article : Le frère d’Hassan Rohani condamné à cinq ans de prisons
L’Institut Brookings est un think tank américain basé à Washington qui traite les différents sujets internationaux. Dans un article publié le mois dernier par le directeur du Center for Middle East Policy de Foreign Policy, Bruce Riedel, livre son analyse au sujet des attaques du samedi 14 septembre qui ont touché deux des plus grands sites pétroliers d’Arabie Saoudite et ont réduit de 5% la production mondiale de pétrole.
Pour l’auteur de l’article, la question qui doit être posée aujourd’hui est celle de la capacité de l’Arabie Saoudite à se défendre sans l’aide de l’armée américaine. Selon lui, « l’attaque était bien plus dévastatrice que toute attaque de Saddam Hussein avec des missiles Scud en 1991 ou des terroristes d’Al-Qaida en 2006. Les Saoudiens sont confrontés à une menace sérieuse qu’ils n’avaient clairement pas anticipée ».
Depuis 1991, l’Arabie Saoudite a dépensé une fortune pour se doter d’une défense antiaérienne efficace et utile contre une menace étrangère. L’incapacité du prince héritier à finir la guerre au Yémen et pire encore, à défendre son pays contre les menaces étrangères est une véritable humiliation pour lui, selon Riedel. Dans la dernière partie de son article, l’auteur s’intéresse au nouveau ministre de l’Énergie saoudien, le prince Abdulaziz bin Salman, frère ainé du prince héritier, qui aura la charge de la reconstruction des infrastructures détruites lors des attaques du 14 septembre.
Liens vers l’article : Saudi leaders thought the kingdom was safe — they were wrong
Dans cet article publié le 25 octobre, Colum Lynch s’intéresse aux résultats d’un sondage effectué par IranPoll (basé à Toronto) en collaboration avec l’Université du Maryland. Ce sondage qui a été mené sur plus de 3000 Iraniens (entretiens téléphoniques) révèle qu’ « une majorité d’Iraniens pensent que de meilleurs missiles balistiques et une suprématie militaire au Moyen-Orient rendront leur pays plus sûr ». Malgré la campagne de « pression maximale » de l’administration américaine, 55% des sondés attribuent les problèmes économiques du pays à la mauvaise gestion des responsables et à la corruption.
Cependant, la stratégie de Donald Trump a comme conséquence une plus grande méfiance des Iraniens vis-à-vis des États-Unis mais aussi des responsables du gouvernement iranien. Depuis maintenant plus de trois ans, le général Soleimani est la figure la plus populaire de la politique iranienne. Sa cote de popularité a augmenté de 72.7% en 2016 à 81.6% en août 2019. Durant la même période, la popularité du Président Hassan Rohani est passé de 82.1% à 42.3%. Le ministre des affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif perd également 11 points de popularité et obtient 67% d’opinion favorable en août 2019.
La sortie des États-Unis de l’accord de Vienne a également dégradé l’opinion des Iraniens vis-à-vis de Washington. Selon le sondage, seulement 12% des Iraniens ont une opinion favorable des États-Unis contre 41% pour la France, 55% pour l’Allemagne, 58% pour la Chine et 70% pour le Japon qui se trouve en première position.
Retrouver l’intégralité de l’article pour consulter les résultats complets du sondage : After Three Years of Trump, Iranians Believe America Is a ‘Dangerous Country’
Le Fonds monétaire international a révisé à la baisse ses prévisions pour l’économie iranienne cette année, prévoyant une baisse de 9,5%, par rapport à sa précédente prévision (6%). Ce sera la pire performance de l’économie depuis 1984, lorsque l’Iran était en pleine guerre contre l’Irak.
Cela-dit, pour Esfandyar Batmanghelidj, plusieurs facteurs montrent que l’économie iranienne va en direction d’une relative stabilisation. Pour l’auteur de l’article, le signe le plus évident de la reprise de l’économie iranienne est le rebondissant de la monnaie iranienne. En effet, depuis le mois de mai, la devise iranienne s’est appréciée de 40% par rapport au dollar. Un rial plus puissant signifie une inflation moins forte.
Un autre facteur positif selon l’auteur c’est l’augmentation des exportations non pétrolières de l’Iran qui « devraient atteindre un niveau record de plus de 40 milliards de dollars cette année. Résultat des efforts du gouvernement et du secteur privé pour stimuler le commerce régional, il se pourrait que ce soit la première année de l’histoire moderne de l’Iran où les exportations autres que de pétrole dépasseront les exportations de pétrole ». Pour Batmanghelidj, l’économie iranienne est fortement fragilisée par les sanctions américaines, mais elle est loin d’être à genoux.
Liens vers l’article : Iran’s Economic Resiliency Makes Talks More Likely
L’agence de presse IRNA s’intéresse dans cet article à un rapport publié récemment par le FMI au sujet de l’économie de 31 pays du Moyen-Orient et de l’Asie centrale. Selon ce rapport, le PIB iranien en 2020 sera de 463 milliards de dollars contre 458 milliards en 2019. Les exportations non pétrolières de l’Iran augmenteront de 1.2% et l’inflation passera de 35.7% à 31%. Le rapport montre que l’économie iranienne a pu surpasser le choc des sanctions américaines. Cependant, la situation reste grave pour Téhéran.
Le facteur le plus inquiétant du rapport concernant l’économie iranienne est au sujet des réserves de change de l’Iran. Fin 2018, les réserves de change de la banque centrale étaient estimées à 101.1 milliards de dollar contre 85.5 milliards fin 2019. Ce déficit est équivalent à 14.3 mois d’importations. Selon les prévisions du FMI, les réserves de change de l’Iran diminueront l’année prochaine également pour atteindre 68.8 milliards de dollars.
Lien vers l’article : Le produit intérieur brut de l’Iran atteindra les 463 milliards de dollar selon le FMI
Arbaïn, fête religieuse chiite commémorant le quarantième jour du martyr de l’Imam Hossein, petit-fils du Prophète, est devenue depuis plusieurs années un symbole de l’influence iranienne en Irak. Mais Arbaïn cette année avait une particularité.
Dans un contexte de manifestations antigouvernementales sanglantes en Irak, « la cérémonie d’Arbaïn était aussi une escarmouche politique – le dernier test du pouvoir de l’Iran en Irak et du désir croissant de l’Irak d’être indépendant de son puissant voisin », selon Alissa J. Rubin et Farnaz Fassihi.
Depuis l’invasion américaine de l’Irak en 2003, Téhéran a pu augmenter de manière très significative son influence sur son voisin. Un peu plus de 4 millions de fidèles iraniens ont fait cette année le pèlerinage d’Arbaïn. L’Iran a aidé logistiquement l’Irak à organiser cet événement majeur du calendrier chiite, en revanche, « lorsque l’Iran a annoncé qu’il enverrait des dizaines de milliers de policiers en Irak pour assurer la sécurité de l’événement, l’Irak a dit non ». Dans cet article, les deux auteures s’intéressent à la relation de ces deux pays, à l’influence de l’Iran et à la réaction des autorités et de la population irakienne.
Lien vers l’article : A Shiite Holiday Turns Into a Test of Iranian Power in Iraq